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Céphalopodes crétacés

Méthodologie

Prise de mesures et indices

L’état souvent fragmentaire des fossiles du genre Pseudobelus induit certaines difficultés dans les prises de mesures. Pour les rostres du groupe bipartitus, la longueur du rostre ou la longueur de la partie postérieure, notamment, sont difficiles à obtenir, la majorité des rostres n’ayant pas de partie apicale complète. Pour ceux du groupe brevis, c’est au contraire la partie antérieure de la cavité alvéolaire qui manque le plus souvent.

Ces particularités n’empêchent nullement les mesures permettant le calcul de l’Indice de compression (Ic = Hm/Lm), cette zone des rostres, plus solide, étant souvent la seule conservée. Mais elles interdisent le calcul de l’Indice de dilatation.  Pour résoudre ce problème, une deuxième prise de mesures a été effectuée dans la région antérieure du rostre, méthode déjà employée par DELATTRE en 1951. Ces mesures sont prises dans la zone la plus étroite qui correspond à la partie de la tige où le sillon dorsal et les rainures latérales sont généralement présents concomitamment, au démarrage de celles-ci. Elles permettent l’obtention d’un Indice de compression antérieur (Ics = Hs/Ls).

La dilatation postérieure du rostre a donc pu être calculée différemment. Un Indice de dilatation latéral a été obtenu en rapportant la valeur de Hm à cFig4elle de Hs (Id-lat = Hm/Hs). Il a été procédé de la même manière pour un Indice de dilatation dorso-ventral (Id-dv = Lm/Ls).

Il est possible de compenser l’absence de la mesure de la longueur du rostre par une estimation de celle-ci (Lre : Longueur du rostre estimée). Elle est obtenue en rapportant les mesures des rostres à celle d’un spécimen de référence complet. Afin de limiter au maximum la marge d’erreur liée à cette estimation, un certain nombre de précautions ont été prises :

  • un spécimen de référence  a été déterminé pour chaque niveau stratigraphique et chaque espèce. Le choix de ce spécimen a été fait en fonction de sa morphologie mais également de son positionnement sur les courbes de tendance linéaires établies pour les indices Ic et Ics ; 
  • l’estimation est basée sur les quatre séries de mesures (Hm, Lm, Hs et Ls), rapportées aux mesures du spécimen de référence. Une moyenne des quatre estimations ainsi obtenues permet de tempérer les écarts possibles, liés aux différences morphologiques des rostres ; 
  • une vérification des longueurs estimées a été menée auprès des spécimens complets dans chaque niveau et pour chaque espèce.

Lorsque cela a été possible, l’angle de la partie apicale a été mesuré à partir d’une face latérale. De même, l’angle formé par la cavité alvéolaire a été mesuré pour les spécimens le permettant.

Une autre série de mesures a été mise en place pour prendre en compte l’importance du creusement des rainures latérales. Elles n’ont pas la même profondeur tout au long du rostre : elles apparaissent dans la partie antérieure, se creusent ensuite plus ou moins profondément, et s’affinent dans la partie postérieure disparaissant dans la région apicale. La largeur du rostre, prise en profondeur au fond des rainures  (Pr) a donc été mesurée, dans la zone de profondeur maximale, et rapportée à la largeur du rostre (Pr/Lm).

La mesure de la longueur du sillon dorsal se heurtait lui aussi au problème de fragmentation des rostres. Cette longueur (L3si) a donc été mesurée à partir de la zone de la tige où sont visibles en même temps le sillon dorsal et les rainures latérales qui correspond à la zone de prise de mesure de Hs et Ls. Cette mesure a été rapportée à celle de la longueur estimée du rostre (L3si/Lre). Néanmoins, cela n’a pas toujours été possible, certains spécimens du groupe brevis ne présentant aucun sillon dorsal.    

Enfin, une grande partie des rostres du genre Pseudobelus possèdent la particularité de présenter une surface striée longitudinalement ou granuleuse comme le signalaient DUVAL-JOUVE,  COMBEMOREL… L’intensité de ces marques est variable. Une estimation de cette intensité a été réalisée selon une échelle de classement en 5 degrés.

Ce système d’échelle a également été utilisé pour quantifier l’intensité du parasitisme, la taille des loges des Crustacés acrothoraciques et leur positionnement sur le rostre. 

Population

a) Population récoltée – population étudiée :

Sur une collection de 2147 rostres du genre Pseudobelus, seule la moitié (1083 spécimens) a pu être mesurée, le reste se révélant trop fragmentaire.  L’état de conservation des rostres n’est pas le même selon les niveaux :

  • pour des raisons de composition du sédiment (plus argileux dans les niveaux élevés du Valanginien supérieur d’où une conservation difficile) ;
  • pour des raisons topographiques favorisant la dispersion des morceaux ;
  • en raison de la morphologie de l’espèce.

Les grands spécimens adultes de Ps. bipartitus se révèlent en effet particulièrement fragiles et ne sont souvent disponibles qu’à l’état de fragments. La zone antérieure des « 3 sillons » est celle qui se conserve le mieux et dans les niveaux les plus élevés du Valanginien supérieur, c’est souvent la seule trace qui reste de ces grands spécimens.

Les fossiles de Pseudobelus brevis, plus courts et compacts, se conservent mieux et ont pu être mesurés dans l’immense majorité des cas. Mais, même eux ne sont que très rarement complets, la partie la plus antérieure, correspondant au début de la cavité alvéolaire, manque le plus souvent.

 

Fig5

 

 

 

b) Répartition géographique :

La récolte des spécimens a été effectuée sur 122 affleurements de  55 communes du Bassin Vocontien, dans les départements des Alpes de Haute-Provence, Alpes Maritimes, les Hautes-Alpes, de l’Ardèche, de la Drôme et du Var.

Les disparités de répartition constatées entre l’Est et l’Ouest du Bassin sont essentiellement liées aux conditions d’affleurement des différents niveaux.

 

 

 

 

 

 

c) Répartition stratigraphique :

Les rostres ont été ramassés dans les niveaux marneux du Valanginien inférieur à l’Hauterivien inférieur-moyen (jusqu’au sommet de la zone à Crioceratites duvali). Aucun fossile du genre Pseudobelus n’a été trouvé au-dessus, dans l’Hauterivien supérieur. Pseudobelus bipartitus a été cité au Berriasien (DELATTRE, ALI-ZADE, KRYMHOLZ, NALNJAEVA et SACH) mais celui-ci n’est pas inclus dans l’étude faute de spécimens.

Les niveaux retenus (1) pour l’étude des spécimens du Valanginien sont les suivants :

Haut. inf.-moy. 230 sp.
Val. term. 27 sp.
Val. sup. 3 120 sp.
Val. sup. 2 270  sp.
Val. sup. 1 285  sp.
Val. inf. 151  sp.
  • Val. inf. : Valanginien inférieur, de la zone à Pertransiens à celle à campylotoxus.
  • Val. sup. 1 (Vs-1) : Valanginien supérieur niveau 1, zone à verrucosum.
  • Val. sup. 2 (Vs-2) : Valanginien supérieur niveau 2, zone à trinodosum.
  • Val. sup. 3 (Vs-3): Valanginien supérieur niveau 3, zone à callidiscus.
  • Val. term. : Valanginien terminal, il correspond à l’extrême sommet de l’étage Valanginien.  

Les deux  derniers niveaux ont été réunis pour certains indices en raison du petit nombre de spécimens mesurables. 


  1.  BULOT L-G, THIEULOY J-P, BLANC E, KLEIN J. 1992. Le cadre stratigraphique du Valanginien supérieur et de l’Hauterivien du Sud-Est de la France : définition des biochronozones et caractérisation de nouveaux

Spécimens de référence

L’Holotype fragmentaire de DE BLAINVILLE ou les figurations dessinées des auteurs qui l’ont immédiatement suivi, ont posé, on l’a vu, de multiples problèmes dans la genèse du genre Pseudobelus. Il s’est donc avéré nécessaire de s’appuyer sur des spécimens bien caractérisés avant même d’entreprendre cette étude.

Deux spécimens ont été sélectionnés, l’un pour Pseudobelus bipartitus  (spécimen 3101) et l’autre pour Pseudobelus brevis (spécimen 36366).

 

Spécimen de référence Ps. bipartitus (n°3101)a) Pseudobelus bipartitus

Fig. 1 a-b, planche I : Sp. n°3101 – Valanginien inférieur - ARDECHE (07)

Sp. LRc Hm Lm Ic Hs Ls Ics Lre Id-lat Id-dv
3101 144 mm 13,5 11,3 1,19 12,1 11,2 1,08 146 mm 1,12 1,01

 

 

Rostre d’un individu adulte, complet à l’exception de l’extrême pointe de l’apex,  remarquable par son état de conservation mais surtout par sa taille, puisqu’il est, à notre connaissance, le plus grand spécimen connu de Ps. bipartitus, atteignant 14,4 cm de long. Il correspond aux descriptions faites par les auteurs des grands spécimens de Pseudobelus du Valanginien inférieur : Rostre très allongé, lancéolé, légèrement dilaté et aplati au tiers de sa longueur, acuminé, presque cylindrique dans sa partie antérieure, présentant sur chacun des flancs légèrement comprimés une profonde rainure latérale.

Ces  rainures, absentes dans la partie antérieure, apparaissent dans le premier quart du rostre, se creusent rapidement pour atteindre leur maximum de largeur et de profondeur vers la moitié du rostre avant de s’atténuer progressivement au point d’être peu discernables au niveau de l’apex. Ces rainures n’occupent pas une position centrale : d’abord déviées dorsalement, elles le sont ensuite ventralement ; la rainure du flanc gauche se dédoublant dans la zone postérieure. L’apex lui-même est nettement dévié ventralement.

Le sillon dorsal qui part de la région alvéolaire reste visible sur la moitié du rostre, très étroit, creusé profondément, il s’estompe progressivement. Il existe donc une zone du rostre où les 2 rainures et le sillon dorsal sont présents en même temps. Cette zone correspond à la partie la plus étroite de la tige du rostre. 

Enfin, en contradiction avec la description initiale de BLAINVILLE mais en accord avec celles de DUVAL-JOUVE et de COMBEMOREL, il faut signaler la présence de stries longitudinales sur la surface du rostre. Ces stries, dont la densité va en augmentant à l’approche de l’apex, sont larges et peu marquées mais très nettement perceptibles à l’œil nu. 

 

Stries sur le sp. 3101

Détail grossi des stries du spécimen 3101

 

 


b) Pseudobelus brevis :

Fig. 1 a-b-c, planche VI : Sp. n°36366 – Hauterivien inférieur-moyen – ALPES-DE-Hte-PROVENCE (04)

  Sp. LRc Hm Lm Ic Hs Ls Ics Lre Id-lat Id-dv
36366 65 mm 6,3 4,8 1,31 5,6 4,9 1,14 69 mm 1,13 0,98

 

 

36366Rostre d’un individu adulte, complet à l’exception du début de la cavité alvéolaire, remarquable lui aussi par son état de conservation et par sa taille, puisqu’il est également, à notre connaissance, le plus grand spécimen connu de Ps. brevis, atteignant 6,5 cm de long.

Le rostre est très allongé, les côtés subparallèles, acuminé, relativement comprimé et aplati au niveau de la partie médiane, quadrangulaire dans sa partie antérieure. La compression antérieure est moins importante que la postérieure, lui donnant, en position dorso-ventrale, une silhouette triangulaire. Il présente sur chacun des flancs une profonde rainure latérale.

Ces  rainures sont évasées et aplaties dans la partie antérieure mais l’absence de la partie la plus antérieure empêche d’en voir le démarrage. Elles se creusent très rapidement pour atteindre leur maximum de profondeur dans le premier tiers du rostre avant de s’atténuer progressivement au point d’être peu discernables au niveau de l’apex. Elles occupent une position centrale, de même que l’apex.

Dans la région alvéolaire, le sillon dorsal débute par un V caractéristique (cf. fig. 1c, planche VI), au fond plat, puis se resserre, s’atténue et disparait entre le premier tiers du rostre et la moitié de celui-ci. La zone où les rainures latérales et le sillon dorsal sont visibles en même temps correspond à la partie la plus étroite de la tige du rostre. 

On remarque à la surface de fortes stries, conformes à celles signalées par DELATTRE ou COMBEMOREL, surtout dans la partie antérieure, accompagnées de granulosités, moins marquées, mais sensibles, dans la moitié postérieure. Ces granulosités sont très nettement perceptibles au toucher. 

36366 detail

 

 

Détail du démarrage du sillon dorsal 

"sillon en V"